JournalTadjikistan : une plainte historique contre le régime d’Emomali Rahmon devant la Cour pénale internationale

mai 6, 2025
FUVI 16

Le 11 avril, un événement historique a eu lieu pour le peuple tadjik. Le principal parti d’opposition interdit au Tadjikistan, le Parti de la renaissance islamique (PRIT), a annoncé avoir officiellement déposé, aux côtés de deux ONG internationales, une plainte devant la Cour pénale internationale (CPI) contre le régime du président Emomali Rahmon.

« Enfin, c’est fait ! », a écrit sur Twitter (X) le leader exilé du PRIT, Muhiddin Kabiri.
« J’espère que [Rahmon] répondra bientôt de tous les crimes commis contre le peuple tadjik. Il a fallu quatre ans de travail, la nation attendait ce jour. »


Une plainte fondée sur 15 années de preuves

Les deux autres plaignants dans cette affaire sont Freedom for Eurasia et le Fonds ukrainien des volontaires internationaux. Selon leur avocat, Nicolas Ligneul, la plainte repose sur des éléments rassemblés au cours des 15 dernières années, concernant 60 cas précis de violations graves : détentions arbitraires, torture, viols, isolement prolongé, disparitions forcées, exil forcé et assassinats.

Selon la plainte, ces actes ne sont pas isolés mais constituent une politique d’État coordonnée visant à éradiquer l’opposition politique, et tout particulièrement les membres et sympathisants du PRIT — interdit depuis 2015.

« Face à l’absence totale de recours internes, la voie internationale est le seul espoir de justice pour les victimes », affirme Me Ligneul dans un communiqué.


La CPI, dernier recours pour un peuple bâillonné

Même si cette étape est symboliquement forte, il reste un long chemin avant que la CPI ne rende une décision. L’examen de la recevabilité et la phase d’enquête préliminaire pourraient prendre plusieurs années. Mais pour les victimes, c’est une première brèche dans le mur d’impunité érigé depuis plus de deux décennies.

Le président Rahmon, au pouvoir depuis 1992, a multiplié les arrestations d’opposants, les procès secrets et les campagnes de répression contre les voix critiques. Le PRIT, autrefois légal et membre du gouvernement, a été accusé de tentative de coup d’État sans preuves transparentes. Ses dirigeants ont été arrêtés, exilés ou condamnés à de lourdes peines de prison.


Autres pressions : la controverse autour du barrage de Rogoun

En parallèle, le régime doit faire face à une autre source de pression : la controverse grandissante autour du projet de barrage hydroélectrique de Rogoun, considéré comme le fleuron de la politique énergétique du pays.

Un organe indépendant associé à la Banque mondiale — un des principaux bailleurs de fonds du projet — mène actuellement une enquête sur d’éventuels manquements aux procédures de sauvegarde lors de l’approbation du financement.

Le 13 avril, Rahmon a convoqué une réunion exceptionnelle avec les hauts représentants de la Banque mondiale, dont Anna Bjerde (directrice des opérations) et Antonella Bassani (vice-présidente pour l’Europe et l’Asie centrale). Selon les médias officiels tadjiks, les discussions ont porté sur l’exportation d’énergie propre et le développement d’une « économie verte ». Mais cette rencontre, inhabituelle par son calendrier, semble surtout traduire une nervosité croissante au sommet du pouvoir.

Source : eurasianet.org

Photo: president.tj

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